Etau, nom masculin : « Appareil formé de deux mâchoires, dont le serrage manuel, à l’aide d’une vis, ou la fermeture, par un dispositif pneumatique ou hydraulique, permet de maintenir en place les pièces ou les objets que l’on veut travailler. » (Merci l’ami Larousse).
On ne se refait pas! Le passé de juriste n’est jamais révolu. C’est une sève méthodologique qui innerve les muscles de la raison. C’est une moelle de pensée, une essence de perception, une approche du réel. On peut très bien se dire rêveur, imprévisible ou encore inclassable, l’étude du jus vous marque au fer rouge de la logica. Libre à soi de ne point l’être dans les états les plus légers de l’existence, l’appel du cogito revient au galop quand les mâchoires d’un étau s’ébranlent, que la situation s’évade soudainement du plan établi. La vérité dévisse et la raison devient l’ultime cheville qui vous relie au vrai, au véritable, au vivable. Alors on définit ce qui qualifiera une série de chroniques ; une série déjà limitée pour ne pas être redondante. L’essentiel de ce qui émoustille la curiosité d’une expérience a déjà été dit. Ces chroniques auront pour but un simple aperçu rétrospectif: un coup d’œil vers la dernière retraite sanitaire imposée. Elle semblait s’éloigner quand à la soudaineté de celle-ci fit place les gémissements des premiers tours d’écrou. Lents, menteurs, vils : l’infâme est de retour!
Les mâchoires ont bougé à peine plus d’un mois et demi depuis la levée du dernier écrou. A la brutalité des instants hivernaux a fait place une certaine langueur de la pression. Celle-ci ne surgit plus : elle s’étale comme une faute irrémédiable suivie de sa chaîne de conséquences. Les caciques tremblent à nouveau d’une fièvre qui ne disparaît jamais dans un système pénitencier étatisé : elle est l’infusion même de l’architecture dont il faut s’abreuver au risque de voir la réalité folle dans laquelle on se trouve. Alors on chevrote en levant le regard vers le prochain barreau d’une échelle infinie ; l’échelon du bas n’a d’autre fonction que de supporter les angoisses de celui qui le précède; le peuple, lui, est l’âne bâté de son propre échafaud. Quelle ironie!
Au fond, on s’interroge sur la part d’implication que l’on offre à ce système en y vivant au quotidien. On se demande pourquoi rester et quel sens a tout cela. Ces personnes qui ne verbalisent pas autant leurs sentiments sont-ils consentants pour autant ? Pas de philosophie de comptoir ni de psychanalyse de bas étages ; les mots ne seront qu’un ruban d’impression, une échappatoire à un flot d’âneries qui tente de se ménager un coin de bonne conscience en mangeant chèvre et tofu. Les chroniques de cet étau se termineront après son dernier tour de vrille, inéluctable mais pour être utilisé une nouvelle fois, il faudra bien que la prise se desserre, c’est sysiphien! Durant ce temps, divaguons et analysons avec un regard volontairement limité et limitant car la quête d’universalité de la pensée est une case déjà cochée par les Lumières et les romantiques au XIXe siècle. Tentons de comprendre d’une hauteur de tabouret ce que sont les ultimes tenants d’un ressac infernal et qui n’a que la mélodie d’un pas de vis vrillé.
Regardez par mes yeux ce que je veux bien vous montrer et vous transmettre, dans l’échelonnement de chroniques courtes et parcellaires. Cette fois-ci, nous auront le temps de scruter les dentelures de ces mâchoires grinçantes. Plus rien ne s’y reflète, elles branlent d’usure mais demeurent sur d’implacables rails, les menant à leur mutuelle rencontre. Ces chroniques n’en seront qu’une vision fantasmée de leur procession macabre. La partition d’un frottement fiévreux, la plan d’une farandole funéraire, le projet d’une fanfare funeste. Vous ai-je dit que j’adorais les allitérations ?